Histoire du quartier Paul-Bert

4 - aux XVIe et XVIIe siècles

 Ce malheureux quartier, riverain de la Loire, fut  l’objet  de durs affrontements et de destructions lors des guerres de religion, dont une bataille restée historique : celle de mai 1589.  

 

Pour entrer dans les détails de cette affaire, il faut se rappeler que le roi, aux prises avec la Révolution parisienne, avait été dans l’obligation de quitter sa capitale et, à Blois, pour se libérer de l’emprise des Guise, Henri III fit assassiner le Balafré. Enfin, après avoir longuement hésité, il se rapprocha du Roi de Navarre. Le 30 avril 1589, l’entrevue eut lieu au château du Plessis, ovationnée par de nombreux tourangeaux. Afin de recruter des  partisans en Poitou, dès le début mai le Béarnais gagna Chinon mais pendant ce temps le Roi se trouvait à Tours avec peu de troupes.

Le duc de Mayenne, à la tête de l’armée de la Ligue, estima que c’était une excellente occasion pour s’emparer du roi et il fit venir ses hommes de nuit.

Il avait prévu deux actions pour réussir son plan, la première consistait à faire intervenir quelques courtisans, ligués secrètement, qui inciteraient "Sa Majesté à se promener aux champs delà le pont" afin de l’intercepter grâce à une embuscade. Si cela ne se réalisait pas, le duc de Mayenne engagerait à Saint-Symphorien un combat afin d’attirer l’ensemble des troupes royales et les partisans de la Ligue à Tours prendraient alors les armes et s’assureraient de la personne de Henri III.

Palma Cayet décrit cette bataille du pont de Tours dans sa "Chronologie novénaire", histoire des guerres de Henri IV de 1589 à 1598. En voici toutefois, ci-dessous, un résumé. 

"Donc, ce 7 mai-là, l’armée du bedonnant duc de Mayenne, venue de l’Ouest et ayant marché 40 kilomètres, se trouve à proximité du faubourg Saint-Symphorien.

Les fidèles du roi Henri III : de Grillon, de Rubempré, de Gerzé et le Maréchal d’Aumont, les affrontent, aidés par les suisses du roi. Il y eut 300 tués dans cet accrochage, mais la résistance acharnée des troupes royales empêcha Mayenne d’atteindre l’objectif qu’il s’était fixé.

Henri de Navarre étant arrivé en renfort, les Mayennais durent se retirer, mais ils pillèrent et brûlèrent le faubourg et la malheureuse église subit, une fois de plus, de sérieux dégâts". 

Les absurdités vandales des guerres de religion s’en prenaient toujours aux innocentes pierres !

Lors de ce XVIe siècle, le faubourg Saint-Symphorien connut cependant un élan de prospérité.

Sur cette partie du plan non daté du XVIIe siècle, on aperçoit le faubourg Saint-Symphorien
Sur cette partie du plan non daté du XVIIe siècle, on aperçoit le faubourg Saint-Symphorien

Bibliothèque Municipale de Tours (manuscrit 1200, n 21).

Le portail de l’église, bâtie par Perpetus au Ve siècle à l’angle des deux voies romaines Nord-Sud et Est-Ouest, fut embelli, de 1526 à 1531, par Pierre Denys, intendant des Finances à Tours et généreux mécène. On voit sur les portes, en bas relief sur bois : d’une part, le martyr de Symphorien et d’autre part, Saint Jérôme rédigeant la "Vulgate"(9) en sa grotte de Bethléem.

 (9) Vulgate : vient du latin Vulgata qui signifie "commune" ou "divulguée".

L'application de ce mot aux versions latines de la Bible en circulation est due à saint Jérôme. Elle a continué, après lui, à désigner la traduction de la Bible en latin réalisée en grande partie par Jérôme lui-même entre la fin du IVe et le début du Ve siècle. Consacrée par l'usage, elle a été reconnue comme "authentique" par l'église catholique lors des conciles de Florence et de Trente.

La plupart des anciens logis du XVIe à colombages, ont disparus Il en est encore de visibles dans les  rues Losserand, du Nouveau-Calvaire et Rochemardon.

C'est aussi au XVIe sicle, en 1548, que débuta en la paroisse, la tenue du registre d'état-civil par l'Eglise, décidée par une ordonnance royale.

L'industrie de la soie connut une intensité qui devait se poursuivre au XVIIe siècle, auquel nous arrivons. Il en vaut vaut la peine. 

C’est en 1609, sous Henri IV, en sa fin de règne, que le Père Joseph du Tremblay, qui devint plus tard la célèbre "Eminence grise" de Richelieu, fut le "gardien" en titre du couvent dit des "Grands Capucins". 

 

Actuellement il ne reste au 10 rue Losserand que l’ancienne conciergerie. C’est le roi qui avait donné en 1601 aux Capucins la permission de s’établir à Tours. Ils bâtirent leur couvent avec l’aide des habitants.

 

Le Père Joseph fut un habile négociateur et devint le redoutable conseiller discret de Richelieu dont il était devenu l’ombre.

 

Il eut aussi à contrôler l’édification très rapide du "Couvent des Calvairiennes" (au n° 42 de la rue du Nouveau Calvaire) en 1635. Les Calvairiennes venaient alors de l’Encloître (Rouziers) où elles dépendaient des abbesses de Fontevraud et où fut inhumée la sœur de Ronsard.

Ce XVIIe siècle qui avait connu une gloire religieuse du faubourg devait mal finir avec la révocation de l'Edit de Nantes par Louis XIV et l'émigration massive et catastrophique des "soyeux" qui s'en suivit. Heureusement que le siècle suivant allait en partie réparer cette royale bévue.